Aidée de figures comme Olivier Schultheis à la direction musicale, Woodkid pour certaines des images (“Que l'aube est belle”), Emmanuelle Favre aux décors ou même Parris Goebel pour certaines chorégraphies (d'autres, comme “Désenchantée” sont signées Mylène Farmer elle-même), la chanteuse délivre un spectacle presque acrobatique, tant ses grands écarts sont intenses. Fourmillant de références diverses, le concert se transforme en constellation de talents hétéroclites, avec ses moments de grâce comme ses numéros moins puissants. On salue ainsi des passages chargés d'une intensité sans pareille, à l'instar de la tragique interprétation de “Que l'aube est belle”, l'un des plus beaux morceaux du dernier album de Mylène Farmer, L'Emprise (2022). Plus loin, alors que les premiers mots du cultissime “Désenchantée” résonnent, on s'étonne de l'arrangement musical choisi, qui fait perdre au morceau sa force originelle. Mais qu'importe, puisque le Stade de France grouille de quelques 80 000 personnes qui n'attendaient que de pouvoir reprendre en cœur ce qui est devenu un hymne pour de nombreuses générations. C'est donc dans l'absence de musique que le concert de Mylène Farmer se fait le plus émouvant, lorsque le temps s'arrête que s'élèvent dans les airs le refrain, intemporel : “Tous mes idéaux : des mots abimés... / Je cherche une âme, qui pourra m'aider / Je suis d'une génération désenchantée”. Et Mylène Farmer de sourire : “C'est incroyable d'avoir une chanson qui résonne autant” avant de faire répéter encore et encore les paroles à son infatigable public. Après quarante ans de carrière, c'est toujours là que réside le point de fascination le plus tangible de la chanteuse rousse : son lien indéfectible avec ses fans, nourri d'une émotion sincère.
Mylène Farmer se transforme en prêtresse gothique au Stade de France (et le sortilège opère)
Au Stade de France, la fébrilité est palpable. À pénétrer dans son immense enceinte (prête à accueillir jusqu'à 80 000 personnes), on ne peut que se souvenir de la déception des fans de Mylène Farmer, lorsque ses concerts, prévus en juin 2023, s'étaient trouvés annulés suite aux manifestations à Saint-Denis en protestation contre la mort de Nahel, un adolescent de 17 ans tué par un policier après un refus d'obtempérer à Nanterre. Avec la réquisition du Stade de France pour les Jeux Olympiques Paris 2024, la chanteuse avait dû patienter, pour déplacer les deux dernières dates de sa tournée Nevermore aux 27 et 28 septembre 2024. Deux concerts complets, auxquels elle ajoutait un ultime rendez-vous, ce 1er octobre 2024. Alors qu'elle lançait le coup d'envoi de ces trois soirées exceptionnelles hier soir, que faut-il retenir de la tournée Nevermore, aujourd'hui devenue la plus grande tournée des stades pour une artiste française ?